Lors du procès d’Andrew Geddes, une de ses victimes, alors âgée de 12 ans, témoigne de l’emprise qu’a eue son entraîneur sur elle.
«Il a détruit ma vie sexuelle, je pense pour toujours». La première victime d’Andrew Geddes, un ancien entraîneur de tennis accusé de viols sur quatre élèves, a décrit vendredi aux assises la relation sous emprise dont elle a été victime à l’âge de 12 ans.
«Depuis ces faits d’abus sexuels et de viols, j’ai jamais eu de relations sexuelles avec un homme et je ne supporte pas la pénétration. Quelle qu’elle soit», a commencé Virginie (le prénom a été modifié), aujourd’hui âgée de 32 ans.
En 1999, elle a 12 ans et fait partie des plus grands espoirs du tennis féminin français lorsqu’elle intègre le club de Sarcelles, le meilleur du Val-d’Oise. Elle y fait la rencontre d’Andrew Geddes, qui devient son entraîneur particulier.
«Je l’idolâtrais», reconnaît Virginie. Elle et sa famille font toute confiance à cet homme de 33 ans, en couple, qui prend la carrière de Virginie en main. «Je pensais que c’était la personne la plus importante de ma vie, quelqu’un qui allait m’aider à accéder à mes rêves», confie celle qui caresse à l’époque l’idée de devenir professionnelle.
Andrew Geddes devient un ami de la famille, emmène Virginie voir des matchs du Paris Saint-Germain au Parc des Princes, la conduit et la ramène de l’entraînement ou des tournois. Elle dort souvent chez lui, pour des raisons pratiques, avance-t-il.
«Pas compris ce qu’il se passait»
Un soir, alors qu’elle est à son domicile, «il me demande de le serrer dans mes bras».«Je trouve ça bizarre mais bon, je me dis qu’il n’a pas d’enfant, qu’il a peut-être besoin d’affection», se rappelle-t-elle. «Et puis un soir, il reste dormir dans mon lit. Le matin, il me caresse la cuisse. J’ai pas compris ce qu’il se passait», détaille la jeune femme.
Plongée dans le milieu du tennis de haut niveau, son sport prend une place prépondérante dans sa vie et l’éloigne de sa famille. «Alors je me dis que moi aussi, j’ai peut-être besoin de câlins», relate Virginie, la voix tremblante.
Petit à petit, les caresses se font plus pressantes. Elle dort de plus en plus souvent au domicile d’Andrew Geddes. Il se masturbe devant elle, la masturbe, tente de la pénétrer parfois mais s’arrête car elle a trop mal.
«Et puis sont venues les fellations, je préférais, ça me faisait moins mal», relate celle qui à l’époque a 13 ans, et se rappelle de tout comme si c’était hier. «De toute façon j’oublie rien. J’aurais préféré oublier.»
«Il m’a volé mes nuits»
A 14 ans, elle trouve la force de mettre un terme à la relation et demande à changer d’entraîneur. Elle est censée quitter l’école et prendre des cours par correspondance pour se consacrer exclusivement au tennis. Mais la veille de la rentrée, elle renonce et retourne au lycée.
«Je me suis dit si tu veux essayer de survivre à ça, il faut que tu aies une vie normale, avec d’autres jeunes de ton âge», explique Virginie. Malgré sa sortie du système fédéral, elle fait toujours partie des meilleures françaises après son bac. On lui propose des bourses conséquentes pour aller étudier aux Etats-Unis mais elle refuse, par peur de s’éloigner de chez elle.
«Il m’a volé mon adolescence. Il m’a volé mes nuits. Dans mes cauchemars encore aujourd’hui il me poursuit, il me rattrape et je le tue. Tout le temps», raconte Virginie. Elle vit aujourd’hui avec une femme, avec qui elle attend son premier enfant, «elle m’a sauvé la vie», raconte Virginie.
Andrew Geddes, qui a toujours nié les viols tout en admettant des gestes déplacés à son égard, a été interrogé après son témoignage. «Je veux bien la croire, mais je ne me représente pas ces moments dans mon esprit», a répondu Andrew Geddes, présentant des excuses.
«J’espère qu’avec le temps, elle pourra se reconstruire et vivre une vie la plus normale possible.» (afp/nxp)
Source: Lematin.ch
https://www.lematin.ch/monde/europe/entraineur-accuse-viols-quatre-eleves/story/13558083
Image: AFP